Le Covid-19:
Mission infection
L'histoire
Je suis un roi. Si,
si ! Vous n'avez qu'à me regarder à l'aide d'un microscope, et vous verrez
bien que j'ai une couronne ! D'où mon nom : coronavirus.J'adore voyager, mais mon problème, c'est que je n'ai pas de jambes. Qu'à cela ne tienne ! J'aime me faire des amis, entrer en contact avec les gens, et je ne suis pas très regardant quant à la tête du client. Tous mes espoirs reposent sur une unique chose : vite me trouver un transporteur, un hôte, quelqu'un à qui m'agripper. Car une fois que je l'ai trouvé, je n'ai qu'à m'y coller de toutes mes forces et me multiplier. Et si rien ne m'arrête, très vite, je peux faire le tour de la planète entière !
Avec les copains COVID-19, nous
attendons, guettons l'occasion d'entrer en contact avec une personne. Mais
notre patience a des limites, car selon où l'on se trouve, notre espérance de
survie n'est pas la même. Notre temps est compté. Tandis que certains ne survivront
que quelques heures dans l'air, sur du papier ou sur du carton, notre troupe,
elle, a la chance d'être postée aujourd'hui sur du métal : nous sommes sur
la surface du toboggan de l'aire de jeux. On a donc quelques jours devant nous
pour nous faire un « ami » et l'infecter.
Une mère et son petit
garçon arrivent au parc. Ils se promènent, ils profitent de ces derniers
moments de liberté, car dès demain midi, tout sera fini ! La population
entière devra rester confinée à la maison, le temps que la pandémie
s'essouffle.
— Chouette ! Deux candidats sont en approche, deux possibilités de contamination !
Dans le groupe, tous les COVID-19 retiennent leur souffle. On observe la mère déposer son enfant et s'asseoir sur un banc, un peu à l'écart.
Surexcité, le jeune garçon s'élance et court dans notre direction, vers le toboggan. Heureux, on est tous là, prêts, on l'attend. Prudemment, l'enfant monte une à une les marches de l'échelle. Ça y est ! Il se rapproche. On le voit prendre place. Le petit s'assied, hésite un moment, puis amorce sa descente. Il glisse, mais pour ne pas aller trop vite, il se ralentit avec les mains de chaque côté du rebord du toboggan.
Contact établi ! On
s'accroche ! Première victoire !
Moi et mes copains COVID, nous venons de contaminer les mains du petit garçon.
Malgré l'effervescence dans le groupe, chacun sait qu'il faut se
ressaisir : notre mission est loin d'être finie. Alors, sans attendre,
nous nous calmons et repérons notre objectif suivant : la bouche ! La
voie royale, la porte d'entrée principale pour infecter le corps et nous
multiplier. Mais ce n'est pas gagné, il y a encore beaucoup de chemin avant d'y
arriver.
Nous restons très confiants, car pour l'instant, tout se déroule comme sur des roulettes. La chance est de notre côté.
Nous restons très confiants, car pour l'instant, tout se déroule comme sur des roulettes. La chance est de notre côté.
Arrivé tout en bas, le
petit a bien du mal à descendre du toboggan. Il se tortille, étire ses jambes
et patatras ! Le voilà par terre, en pleurs. Plus de peur que de mal : il essuie ses larmes avec ses mains et, du même
coup, il étale l'ensemble de notre bataillon sur tout son visage.
Waouh ! Ça commence à sentir la victoire ! Au sein de la troupe des COVID-19, le cœur est à la fête. La plupart des copains sont maintenant bien positionnés ; sur les joues, près de l'entrée, près de la bouche.
La mère, qui a tout vu, accourt. Super ! Tous les COVID voient en elle une nouvelle chance de contamination, une nouvelle voie de propagation. Elle récupère l'enfant dans ses bras. Et pour le consoler, elle lui fait des papouilles et l'embrasse sur les joues.
Une fois le chagrin de
son fils envolé, la mère propose d'aller aux toilettes se laver les mains.
Non ! Quelle horreur ! De l'eau et du savon : c'est notre arrêt
de mort ! Et pour ajouter à notre malheur, la mère sort de son sac à main
une lingette imbibée d'une solution hydroalcoolique. Avec soin, elle nettoie le
visage du bambin. C'est l'hécatombe ! Avec ce simple geste barrière, la
mère vient d'éradiquer les deux tiers de notre troupe.
La prudente maman se lave ensuite les
mains, sans pourtant se douter une seconde que nous sommes toujours là,
quelques survivants COVID, en embuscade sur son visage.
Finalement, en parlant, sa langue effleure ses lèvres. Victoire ! Nous
entrons dans sa bouche !
La bouche. Quel endroit
merveilleux ! Chaud, doux et tapissé de voies, de multiples passages où
l'on peut se faufiler pour entrer dans la circulation sanguine. À partir de là,
c'est chacun pour soi. Plus de troupe, plus de bataillon, je deviens un
commando ayant pour seul but de me multiplier. Le mot d'ordre est :
INFECTER !
Pour cela, ma stratégie est simple : je dois trouver LA cellule, celle dont j'ai LA clé qui me permettra de m'y introduire. Alors je me balade, je me promène, emporté par le flot sanguin.
Tout à coup, je me heurte à un gros balèze, un gendarme du système immunitaire. Son travail : défendre le corps contre les intrus venant de l'extérieur. Dès qu'il m'aperçoit, il se méfie… Il me regarde droit dans les yeux et me jauge. Par chance, à ce jour, aucun vaccin n'existe. Personne n'a encore trouvé la façon de m'empêcher d'accomplir ma mission. Et sans vaccination, les gendarmes ne sont pas informés que je suis une menace. Alors, de sa grosse voix, il me dit : « Circulez ! Il n'y a rien à voir. » Aussitôt, je pars sans demander mon reste, je continue ma course comme si de rien n'était.
La mère ne se sent pas
très bien, et chose bizarre, elle perd brutalement le goût et l'odorat. Puis,
en plus des écoulements nasaux, progressivement, d'autres symptômes
s'installent : maux de tête, courbatures et toux. Tout porte à croire que
c'est une infection par le COVID-19.
Inquiet, son mari décide d'appeler leur médecin de famille. Sans problèmes respiratoires, la situation n'est pas jugée préoccupante. Le docteur conseille alors du repos et de, surtout, garder ses distances. Histoire de ne pas contaminer le reste de la maisonnée.
Ça fait une semaine
que je fais la fête. Je me multiplie à l'infini. C'est la méga infection à la
chaîne ! J'admire mes copies, ma royale descendance, et j'en suis
fier !Puis, un beau matin, les choses se compliquent. La température de la maman
monte à 38,8 °C. Pour nous, les COVID, ça commence à faire vraiment chaud.
Notre travail tourne au ralenti. La production de nouveaux COVID diminue ;
le taux de réplication chute.
Et s'il n'y avait que cela… Une alerte a été lancée ! De partout, on voit débarquer des équipes de choc venues en renfort. Des gars envoyés par le système immunitaire pour éliminer les cellules que l'on a infectées. On a même plus le temps de se reproduire ; ils nous coupent l'herbe sous le pied.
En plus, les cellules
infectées signalent notre présence aux cellules saines : elles se passent
le mot pour se défendre contre nous. Dur, dur dans ces conditions de continuer
à se multiplier !
Puis catastrophe !
Voici qu'apparaissent des avis de recherche avec notre tête. Les gendarmes, qui
hier nous croyaient innocents, nous font aujourd'hui la chasse. Ils nous
capturent et zip ! ils nous font disparaître ! Franchement, je crains le pire. Notre mission semble compromise…
Après une semaine au
lit, la maman est aujourd'hui guérie. Jeune, sans problème de santé, son système immunitaire a su réagir et mettre
K.-O. le COVID-19.
Alors en attendant que
les scientifiques trouvent le vaccin pour tenir à distance les légions de
COVID-19, voici la marche à suivre :
- se
laver les mains très régulièrement ;
- tousser
ou éternuer dans son coude ou dans un mouchoir ;
- saluer
sans se serrer la main, arrêter les embrassades ;
- utiliser
des mouchoirs à usage unique et les jeter ;
- éviter les rassemblements, limiter les déplacements et les contacts.
Johanne Gagné, Mission
infection, ill. Thomas Tessier
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